Des réseaux de braconnage internationaux sévissent au Cameroun
Le Cameroun est en passe de devenir le nouveau cimetière des éléphants. Depuis déjà quelques mois, ces animaux sont la cible de braconniers en quête d’un ivoire qui alimente des trafics internationaux. Aujourd’hui, les organisations sur place s’insurgent contre l’immobilisme politique des autorités locales et régionales.
Le constat et sans appel et les témoignages concordent, les groupes de braconniers qui parcourent le parc national protégé de Bouba N’Djida ne sont pas camerounais. Organisés en véritables formations paramilitaires, treillis et armement compris, des hommes venus vraisemblablement du Soudan et du Tchad écument le Nord du Cameroun. D’après les touristes et les organisations environnementales présents sur place, ces braconniers armés de fusils automatiques type kalashnikov et de mitrailleuses lourdes ont déjà décimé plus de deux cents éléphants.
D’après le Fond international pour la protection des animaux (IFAW), nous sommes loin de quelques paysans pauvres venus chercher un moyen de subsister. Ce sont de véritables groupes criminels organisés, usant de modes opératoires bien rodés. Chaque année au moment de la saison sèche, les braconniers soudanais passent la frontière camerounaise poreuse et peu surveillée et pénètrent en toute impunité pour s’approvisionner en ivoire. Grâce à un soutien logistique et des bases de repli situées au Tchad, l’ivoire est extrait du pays et rejoint les filières internationales d’exportations illégales en direction de l’Asie.
Alain Nouredine, expert en environnement et zones protégées, met en avant dans un rapport la complicité des autorités locales et surtout des villageois. Les éléphants posent de nombreux problèmes dans le Nord du Cameroun, car ils sont souvent à l’origine de destructions dans les plantations. Les populations locales ne voient donc pas d’un mauvais œil l’arrivée de ces braconniers, qui éliminent les éléphants, achètent de la nourriture dans les villages et, ne prenant que l’ivoire, laisse de grande quantité de viande gratuite derrière eux. L’absence quasi-totale de politiques de dédommagements pour les destructions, ainsi qu’une corruption endémique, sont en partie responsables de cette situation.
Aujourd’hui, les spécialistes environnementaux et politiques pointent du doigt l’absence de réactions des autorités camerounaises. Le véritable problème, pour le chef de la Délégation européenne à Yaoundé, réside dans l’impunité accordée aux braconniers, très rarement condamnés. Les sept rangers assignés par le ministère des Forêts et des Aires protégées à la surveillance du parc national ne sont pas de taille à lutter, avec leurs fusils vétustes, contre la puissance de feu adverse. En 2010, deux de leurs membres ont été abattus. L’Union européenne, qui a pourtant proposé son aide financière pour un projet de protection des zones du Cameroun, Tchad et Centrafrique, dénonce l’indifférence totale du gouvernement camerounais face à un problème devenu un enjeu de sécurité nationale.